«Zone libre» : des restaurateurs affichent leur refus de contrôler le passe sanitaire
Pour ce restaurateur d'une ville de l'est de la France, il était hors de question de contrôler ses propres clients : il n'est «pas leur mère». Avec ou sans passe sanitaire, donc, tous continuent d'être accueillis dans son établissement, et l'entrée en vigueur des mesures estivales n'y a rien changé. Il faut dire que l'irréductible aubergiste n'en est pas à son coup d'essai: pendant le confinement, il continuait de servir trente à quarante couverts par jour, comme si de rien n'était...
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Mais voilà : sur fond de contestation grandissante, ce réfractaire tient là un véritable argument marketing. Et les clients du troquet ne s'y sont pas trompés, qui viennent plus nombreux qu'à l'accoutumée siroter avec leur cervoise le goût savoureux de la liberté. «Les gens me connaissent depuis longtemps, explique-t-il. Ils savent que je ne suis pas dans la conformité... Ils se le disent entre eux, ils en parlent, et la rumeur se répand. Ceux qui viennent boire ici aujourd'hui le font en partie parce qu'ils savent que je ne les embêterais pas.»
L'un d'entre eux ajoute tout de même que la configuration des lieux aide aussi à prendre le risque de s'y attabler, même sans passe sanitaire : donnant sur une petite cour, la taverne offre une confortable «issue de secours» au cas où les forces de l'ordre viendraient effectuer une visite impromptue. Quant au risque d'une fermeture administrative, le patron le redoute mais le relativise quelque peu: «Avec un référé-liberté , on peut réduire considérablement le temps de fermeture; mais enfin chaque jour compte, et quand je reste fermé je n'ai pas d'argent qui rentre». Alors, s'il faut en passer par là, il reste toujours les vieilles combines. Comme celle-ci : on peut scanner cinq fois le même QR code pour cinq clients différents. L'application dont disposent les restaurateurs, elle, ne fait pas la différence et le gérant des lieux pourra toujours expliquer s'être fait berner au cas où la patrouille arrive.
Du reste, la ville assure de son côté au Figaro n'avoir «pas connaissance» de cette initiative, et poursuivre malgré tout les contrôles dans les établissements de son territoire soumis à l'obligation de vérifier le passe sanitaire.
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— Tasty Fri Jul 24 13:27:07 +0000 2020
«Tous bienvenus»
Ce restaurant qui clame haut et fort son rattachement à la «zone libre» n'est pas le seul; et pour encourager à la désobéissance, un mouvement est même né sur les réseaux sociaux, proposant aux récalcitrants d'appâter les clients non-vaccinés au moyen d'un discret petit macaron vert distribué à qui en fait la demande. «Ici, on respecte votre liberté, votre dignité et le secret médical» peut-on y lire, au milieu d'un slogan, «tous bienvenus», qui forme une drôle de contrefaçon du célèbre «venez comme vous êtes» d'une enseigne de fast-food bien connue.
À l'origine, l'initiative n'était pourtant pas si insolente que cela: «J'ai eu l'intuition qu'il fallait un message positif pour contrebalancer la morosité des annonces d'Emmanuel Macron», confie l'instigateur du mouvement. Au lendemain de l'introduction du passe sanitaire, il propose alors à ceux des commerçants de son quartier qui ne sont pas soumis à l'obligation de contrôler le passe d'afficher le petit macaron vert, pour rappeler aux clients qu'il subsiste «quelques espaces de liberté». «C'était une façon de fédérer derrière un message réjouissant, mais je n'avais pas en tête de lancer un mouvement de désobéissance civile», ajoute-t-il.
L'appétit vient en mangeant. Alors que l'autocollant connaît un vif succès, il est vite sollicité par des restaurateurs («une vingtaine en quelques jours») qui imaginent déjà en faire l'emblème de leur refus d'appliquer les consignes. Et d'inoffensif qu'il était, voilà le petit macaron vert devenu malgré lui un symbole dissident.
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L'ennui, c'est qu'être visible est à double tranchant. De même que l'idée, un temps imaginée par le collectif, de constituer un annuaire des établissements réfractaires, en est toujours au point mort. Et s'il se «garde bien de communiquer les noms et adresses des restaurateurs» qui lui ont demandé des macarons, le fondateur de «Zone libre» admet donc que concilier la volonté de publiciser ces établissements, tout en les préservant d'un contrôle administratif désagréable, constitue un drôle de numéro d'équilibriste. Encore que tous les restaurants concernés n'ont pas le même souci de la discrétion: certains n'hésitent pas même à communiquer auprès de la presse locale, comme ici à l'endroit de nos confrères de La Dépêche .
Pour les plus prudents, le petit rond vert reste néanmoins planqué dans le tiroir-caisse, et on ne le sort que discrètement, pour quelques photos avec des clients de connivence. Beaucoup du reste le reconnaissent: si l'on veut recevoir des clients non-vaccinés sans trop attirer l'attention, le plus sûr reste de compter sur le bouche-à-oreille. Message reçu cinq sur cinq pour beaucoup d'abonnés de la page Facebook du mouvement «Zone libre», qui ne publient que des informations très vagues («Zone Libre à [...] chez un restaurateur courageux») et ne communiquent ensuite les bonnes adresses que par message privé.
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