Avec « Goliath », un poignant récit en réalité virtuelle sur la psychose
En vingt-cinq minutes d’une narration riche et inventive, Goliath : Playing With Reality, une œuvre en réalité virtuelle (VR) de Barry Gene Murphy et May Abdalla – récompensée par le Grand Prix du jury au Venice VR Expanded –, relate le combat contre la psychose d’un homme qui a passé plusieurs années en hôpital psychiatrique. Une plongée dans un univers glacé où les pensées sont brumeuses et confuses.
Par le passé, des histoires bouleversantes ont été narrées par des psychotiques parvenus à surnager dans la maladie puis à témoigner, à l’image de Polo Tonka et de son Dialogue avec moi-même. En chaussant un casque VR, on découvre ici une facette nouvelle de la psychose : un versant plus incarné, plus condensé, plus brutal parfois.
La chute libre
Le casque posé sur les yeux fait l’effet d’un écran immense, qui nous ceint, nous enserre, nous coupant totalement de notre environnement familier pour nous jeter dans l’imaginaire de Goliath, le pseudonyme de joueur en ligne adopté par le personnage. Avec celle de l’actrice Tilda Swinton, qui nous guide dans l’histoire, la voix de cet homme résonne le long du parcours (malheureusement en anglais non sous-titré) : « My fucking head is just fucked » (« ma foutue tête est foutue »).
Dans une scène-clé, Goliath mixe des morceaux de musique techno dans un club britannique. Nous sommes installés directement sur ses platines, des canettes d’alcool devant nous, comme si nous empruntions le regard d’une petite souris égarée devant des fêtards démesurément grands. Un angle de vue opportun car à cet instant Goliath a le nez dans les boutons de sa platine. Selon ses propres dires, il est occupé à explorer des idées musicales radicales et violentes.
Soudain, la platine explose. La vie de Goliath part littéralement en petits morceaux qui flottent en lévitation autour de nous – métaphore visuelle d’un épisode psychotique sévère accompagné d’hallucinations. La vue de Goliath s’assombrit, les manettes de VR que nous tenons en main vibrent longuement, faisant un peu ressentir le bourdonnement qui envahit l’esprit du personnage. Dans le noir d’encre émergent doucement quelques carreaux de carrelage, qui s’étendent petit à petit, révélant les contours d’une cellule. Puis d’autres cellules se mettent à flotter autour de nous, symbolisant la multiplication de ses jours d’isolement.
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— nationalinfo.in Fri Sep 30 08:24:25 +0000 2016
En chute libre, Goliath est traversé par le discours des psychiatres, des gélules de toutes formes volant vers nous. « Les médicaments te mettent complètement KO », témoigne Goliath, qui entend des voix imaginaires le traitant de « merde ». « Tout s’effondre autour de moi. Et puis tu es tout seul. Et ça dure éternellement. »
Six ans passent, et nous voici invités à presser un bouton que l’on croirait tiré d’une vieille borne d’arcade. Les créateurs de l’œuvre filent l’imaginaire du jeu vidéo du début à la fin de la narration avec justesse et avec une remarquable richesse graphique. Le bouton pressé, nous chutons, accompagnant Goliath dans son retour au monde réel. Un retour abrégé puisqu’il peine à s’insérer dans cet univers si peu accueillant pour lui.
Le salut par les jeux vidéo
Plongés dans un grand parc d’attraction virtuel, nous voici invités à tirer sur de petits oiseaux avec des pistolets. A de nombreuses reprises dans cette œuvre virtuelle, nous utilisons nos mains dans de courtes phases d’interaction renforçant le sentiment de prendre part à cette destinée émouvante. Cet épisode marque l’entrée de Goliath dans l’univers du jeu vidéo en ligne qui deviendra son refuge. « Parfois, tu n’as pas le contrôle, mais dans les jeux, tu l’as », explique-t-il de sa voix caverneuse.
L’histoire s’achève dans un appartement minuscule et dépouillé. Les meubles de ce studio se dissolvent lentement, puis ses murs s’effacent pour révéler en arrière-plan le décor d’un jeu vidéo en ligne, où Goliath, devenu robot géant, passe l’essentiel de son temps avec ses nouveaux amis, dont certains sont considérés comme handicapés par l’administration, tout comme lui. Un monde virtuel certes, mais un monde partagé avec d’autres personnes – et non une réalité hallucinée qui vous isole. Un mieux que rien, comme il en témoigne :
« Les pensées sont toujours là, ma paranoïa est toujours là. Mais des trucs comme le streaming et les jeux vidéo gardent mon esprit à distance de toute cette merde, et j’oublie, vous comprenez ? Je suis plus heureux, je pense ? Je veux juste vivre un petit peu. Vivre une vie. »
A l’heure où la réalité virtuelle nourrit le fantasme d’un métavers permettant de s’affranchir de certaines contraintes du monde physique, Goliath utilise cette technologie dans un but inverse : nous faire vivre le combat et les souffrances des nombreux hommes et femmes en proie à de grandes difficultés psychiques qui, elles, sont bien réelles, et trop souvent oubliées.
« Goliath : playing with reality ». Application de réalité virtuelle gratuite compatible avec les casques Oculus Quest 1 et 2.
Nicolas Six
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