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Philippe Torreton : « La cathédrale de Rouen est un être vivant »

« Bienvenue dans ma cathédrale ». Les cathédrales sont, dans chaque ville, un point de ralliement, qu’on soit croyant ou touriste de passage. Elles sont aussi, pour certains, des lieux à forte valeur émotionnelle. On s'y recueille quelques instants à l'abri du tumulte extérieur, on y prie, on y chante, on s’y marie… Cet été, La Vie vous emmène à leur rencontre, à travers l'œil de différentes personnalités, qui ont, toutes à leur manière, développé un lien intime avec ces grandes dames, emblématiques du patrimoine français.

Même lorsqu’on a grandi en périphérie rouennaise, loin du centre-ville, il est difficile de passer à côté de la cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption. Originaire du Grand-Quevilly, au sud de Rouen, l’acteur Philippe Torreton (César du meilleur acteur pour son rôle dans le film Capitaine Conan en 1997) a toujours été fasciné par la silhouette de l’imposant édifice. « Mes parents ne m’ayant pas éduqué dans la foi catholique, nous n’allions pas à la messe et jamais ils ne m’ont emmené la voir », raconte le comédien.

Endommagée pendant la guerre

C’est adolescent qu’il la découvre pour la première fois, alors qu’elle se dresse sur le chemin de son université. « Je m’y arrêtais de temps en temps. Elle symbolisait mes errances spirituelles et sentimentales », livre-t-il.

Son intérêt pour le colosse de pierre trouve sans doute ses racines dans sa passion pour l’histoire. « Il est important pour moi de savoir d’où l’on vient, de connaître ce qu’il s’est passé », explique-t-il. Or, la cathédrale de Rouen porte en elle les stigmates de la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle elle a bien failli être détruite.

La première fois en 1940, lors de la prise de la ville par les Allemands. « Les nazis ont laissé brûler les bâtiments et ont interdit aux pompiers d’intervenir sous peine de les mitrailler. C'est seulement lorsque la cathédrale a été menacée par les flammes qu'ils ont été autorisés à éteindre l'incendie. Les Rouennais devaient être dans le même état que les Parisiens lorsque Notre-Dame de Paris a brûlé », raconte le comédien, qui prête souvent sa voix à des documentaires historiques.

La seconde fois, un peu avant la libération en avril 1944, lorsque sept bombes s’écrasent sur l’édifice, endommageant les bas-côtés de la nef et les chapelles du collatéral sud. « Ma famille du côté paternel a été très marquée par ces bombardements », livre-t-il.

« Il y a quelque chose de vivant dans cette cathédrale »

Philippe Torreton : « La cathédrale de Rouen est un être vivant »

Le jeune philippe Torreton part à vingt ans pour le conservatoire de théâtre de Paris et sa vie de comédien le tient éloigné de la cathédrale de Rouen. Beaucoup plus tard, en 2019, de passage dans sa ville natale pour la tournée du spectacle J’ai pris mon père sur mes épaules, le hasard fait qu’on lui réserve une chambre d’hôtel au pied de Notre-Dame-de-l’Assomption. Il la redécouvre alors.

« Depuis mon balcon, j’avais l’impression d’être posé sur la cathédrale. C’était tellement immense et tarabiscoté que cela m’évoquait presque un milieu biologique. Une forêt de pierres, de bois, d’ardoise qui aurait poussé au cœur de la ville. Cet édifice est une construction humaine et pourtant, le résultat donne l’impression d’avoir germé tout seul dans une sorte d’anarchie de flèches, de toits, de triangles, de gargouilles… Comme des bourgeons qui, plus tard, deviendraient des tours. Il y avait quelque chose de vivant dans cette cathédrale », raconte-t-il. Une description passionnée qu’il explique par le choc provoqué en lui par l’incendie de Notre-Dame de Paris quelques mois plus tôt.

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Philippe Torreton n’est pas le premier artiste à admirer l’édifice depuis sa chambre. Entre 1892 et 1894, Claude Monet peint sa célèbre série de cathédrales de Rouen, depuis plusieurs appartements donnant sur sa façade. « Mon balcon n’était pas exactement devant la façade principale comme celui de Monet mais plus du côté de la Seine. Je pense néanmoins avoir eu le même sentiment que lui : ce bâtiment paraît fixe mais il est en fait mouvant par la lumière, la qualité du ciel. Une cathédrale est un être vivant », répète-t-il.

Spectacle et vertige

Une impression que le comédien doit sans doute à l’aspect “désordonné” de la cathédrale de Rouen, considérée comme « la plus humaine » de ses sœurs, pour son manque de symétrie. La Tour Saint-Romain (à gauche en regardant la façade) dont la construction a débuté vers 1145 est en effet très différente et plus vieille que la Tour de Beurre construite au XVIe siècle.

Une fois à l’intérieur, l'édifice apparaît beaucoup plus épuré. « Il s’agit d’un grand espace ajouré. La hauteur du plafond donne presque le vertige lorsqu’on regarde en haut », témoigne Philippe Torreton. En bon comédien, il ne peut s’empêcher d’imaginer le spectacle que constituait le sermon du prêtre, en haut de son prêchoir, au Moyen-Âge. « L'écho des sons rebondissait sur les murs, les rayons du soleil filtraient à travers les vitraux : La cathédrale était une sorte de son et lumière de l’époque. »

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Philippe Torreton parle en connaissance de cause, lui qui a été invité à lire des textes de Péguy, Claudel et Mère Teresa à Notre-Dame de Paris pour le Vendredi Saint, un an après l’incendie. «Chaque phrase doit être isolée pour être comprise, sinon les mots s’entrechoquent et cela devient un imbroglio de paroles. Cela oblige à une certaine forme de scansion pour que le message passe. Au Moyen- âge, lorsque la cathédrale a été construite, tout était fait pour que les esprits soient repus de quelque chose de plus grand, de plus fort qu’eux », poursuit-il.

De quoi lui donner des idées pour ses prochaines pièces ? « Un Shakespeare ou un Victor Hugo dans une cathédrale, l’idée est séduisante… Cela m’est arrivé plusieurs fois de rêver à ça en visitant celle de Rouen. Mais il faudra pour cela régler les problèmes d’acoustique », révèle-t-il. Une chose est sûre, Claude Monet n’est pas le seul artiste que Notre-Dame-de-l’Assomption a inspiré.

Cathédrale Notre-Dame-de-l’Assomption Horaires : du mardi au dimanche de 09h à 19h, dimanche de 08h à 18h et lundi de 14h à 19hL’info insolite : La Tour de Beurre (celle de droite en regardant la façade) aurait inspiré les architectes de la Tribune Tower, un célèbre building de Chicago construit entre 1923 et 1925.À voir : Les jardins d’Albane, attenants à la cathédrale, reprenant le tracé d'un cloître qui aurait dû être construit au XIIIe siècle.

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