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Télétravailler depuis l'étranger : ils ont franchi le cap, ils racontent

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Lancelot Chardonnet, 27 ans, salarié chez Dataiku, une start-up informatique, a profité de l’occasion en plein mois de janvier 2020, en prenant un aller simple pour les Canaries. «J'en avais marre de Paris et du confinement, je voulais du soleil, de la chaleur, de la liberté… J'ai fait part de mon projetà mon employeur. Il m'a laissé partir sans aucune difficulté. Mon travail peut être effectué n'importe où», raconte le jeune développeur de logiciels. Initialement prévu pour deux mois, son séjour, s'est prolongé et Lancelot est resté six mois sur l'île de La Palma. Pas de visa à renouveler (c'est l'Europe !), pas de couvre-feu avec les poules et un mini-décalage horaire d'une heure. La vie canarienne l'a séduit, à tous points de vue. «Les conditions de travail sont excellentes, le réseau WiFi est bon sur toute l'île et les infrastructures nombreuses. J'ai rejoint un espace de coliving à Los Llanos de Ariadne, avec vue sur les montagnes, pour profiter d'une ambiance studieuse», se réjouit le globe-trotter, qui espère déjà renouveler l'expérience dans quelques mois.

Le risque de la solitude

Ynès Louma, sales manager chez Mozoo, spécialiste de la publicité digitale, dresse peu ou prou le même bilan de son escapade à Majorque, aux Baléares. Elle y a passé trois mois, de mars à juin, après avoir obtenu la bénédiction de son entreprise. «J'étais entourée d'une communauté de nomades très stimulante. Du coup, j’étais bien plus productive qu'à Paris. En semaine, je travaillais autant, si ce n'est plus, mais le week-end, c'était rando, restau, plage et piscine à volonté», explique la commerciale de 27 ans, conquise par cette parenthèse enchantée.

Toutes les destinations n'offrent pas des conditions aussi idylliques. Certains pays s'autoproclamant «remote workers friendly» imposent de fortes barrières à l'entrée. Les îles Antigua, Barbuda ou la Barbade, entre autres, n'acceptent que les nomades aisés, justifiant de revenus de plus de 50.000 dollars annuels, soit 41.500 euros. Cette sélection par l'argent a douché bien des enthousiasmes. Carla (prénom modifié), chargée de projet dans une agence web bordelaise, a ainsi renoncé à son rêve de carte postale dans les Caraïbes. «J'avais repéré sur les réseaux l'offre de la Barbade. Mais franchement, c'était trop cher pour moi et les démarches trop compliquées. Je me suis repliée sur les Pyrénées», plaisante-t-elle, un tantinet déçue.

Attention aussi au fantasme de la vie sous les cocotiers ! On ne part pas pour se la couler douce ou bronzer mais bien pour travailler. «Les débits Internet, le décalage horaire, les conditions de logements sont des critères à prendre en compte», prévient Fabrice Dubesset, blogueur qui vit une partie de l'année en Colombie et auteur de Libre d'être digital nomad (Diateino, 2020). Ces précautions sont indispensables mais, d'après les pros du nomadisme, le plus grand risque est ailleurs. «Au début, tout est rose. Mais au bout de quelques semaines, les tropiques n'ont plus le même charme. La solitude est l’un des inconvénients majeurs de ce type d'expérience. Il vaut mieux privilégier les pays “remote friendly”. Bali, par exemple, est un gros hub, avec de nombreux espaces de travail et une importante communauté de nomades. On y travaille très bien sans se sentir isolé», indique Samuel Durand, qui cite également la Croatie, la Géorgie et l'Estonie pour la qualité de leurs infrastructures.

Des pauses qualitatives

Télétravailler depuis l'étranger : ils ont franchi le cap, ils racontent

Mais la liste de ces paradis terrestres est aussi longue que changeante tant de nouvelles opérations séduction apparaissent tous les jours aux quatre coins du globe. A Madère, les autorités portugaises ont par exemple lancé en début d'année le premier village numérique. Au sud du Maroc, le village de Taghazout, réputé pour son école de surf, a de son côté créé des espaces de coworking. C'est d'ailleurs l’un des hubs montants en ce moment. Face à un tel choix, un petit détour sur le site nomadlist.com s'avèrera utile. Cette plateforme répertorie les destinations les plus adaptées, en prenant en compte des critères comme le coût de la vie sur place, la sécurité du pays, ses infrastructures, le réseau WiFi… En tête de liste, on trouve le Portugal, l'Indonésie, les Canaries, la Thaïlande et le Mexique, dont la cote de popularité monte en flèche depuis quelques mois.

En mars dernier, Margaux Roux, ex-cadre chez Go Sport, a justement jeté son dévolu sur Tulum, dans la péninsule du Yucatan. «L'écosystème business est au top. Je travaille dix heures par jour sans m'en rendre compte. Mais je vis pieds nus, à l'air libre, je vais surfer le matin, je dîne le soir sur la plage. Les moments de pause sont qualitatifs et très ressourçants», explique la jeune femme, qui gère à distance la communication de Chacun son café, une entreprise française qui propose des solutions de café responsable aux entreprises. Cette baroudeuse(elle a passé trois ans à Bali), créatrice du collectif de free-lances Le Hub Nomade, observe avec curiosité les nouvelles pratiques liées au télétravail.

«Les cas de salariés à l'étranger sont rares. C'est un phénomène encore marginal car les freins administratifs et culturels persistent. Je crois davantage au “workation” – contraction de work et vacation –, des retraites de quelques semaines dans des pays sympas, organisées directement par les employeurs. Je suis sûre qu'on y viendra, ce sera même un moyen d'attirer les jeunes talents», pronostique la trentenaire. D'après un sondage OpinionWay pour la start-up Remoters publié fin mai, 62% des télétravailleurs de moins de 35 ans aimeraient en effet travailler une fois par an depuis l'étranger. Les DRH n'ont décidément pas fini de se casser la tête face aux futures évolutions du travail !

Six pays pour tenter l'expérience

Costa Rica

Grâce au visa «residencia temporal empleados especializados por cuenta propia», les voyageurs peuvent désormais rester deux ans. Les démarches sont un peu fastidieuses mais après, à vous la belle vie en pleine nature ! migracion.go.cr, onglet Visas

Géorgie

C'est un des premiers pays à avoir lancé la mode du télétravail à l'étranger en août 2020. Quelque 800 nomades, séduits par les plages de la mer Noire, s'y sont installés depuis. Une attestation d'assurance santé et des revenus de 2 000 dollars mensuels (1 660 euros) sont exigés pour postuler. registration.gov.ge/pub/form/20/ydrv71

Madère, Portugal

Le gouvernement a lancé en mars 2021 un village numérique à Ponta do Sol. Il accueille 150 nomades qui doivent s'engager à rester entre un et six mois. Plusieurs sessions de candidature sont organisées. digitalnomads.startupmadeira.eu

Bali, Indonésie

Une destination incontournable pour bosser au bord de l'eau. Notamment Hubud et Canggu, deux villages aux conditions de travail idéales (espaces de coworking, débit Internet rapide, communauté…). Indonesie-tourisme.fr

Croatie

Le pays propose depuis janvierun «digital nomad visa», valable un an. Il est accessible à condition de présenter une attestation santé, un contrat de location habitation etde disposer d'un revenu minimum de 16 142 kunas par mois, soit 2 150 euros. mup.gov.hr, onglets Aliens, Temporary Stay

Thaïlande

Que ce soit àChiang Mai ou à Koh Lanta, on trouve desespaces de coworking, des réseaux de nomades et d'expatriés, et, bien sûr, des paysages à couper le souffle. tourismethaifr.com

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